AICHA
Notre Refuge pour cette jument frison 
ANNIVERSAIRE  : 1  octobre 1985
ARRIVE AU REFUGE  LE :  29/9/2004
-JUMENT FRISON 
DECEDE(E) LE 17/11/2008



C’ est constant dans l’esprit des membres de l’équipe : notre nature et notre volonté sont telles que lorsque nous voyons de braves chevaux être la cible de bouchers;  nous cherchons toujours à tenter de les délivrer.
Mais au marché aux chevaux , il faut le reconnaître objectivement, cette tâche est pratiquement impossible à appliquer pour les 200  condamnés du jour rassemblés en ce lieu d’enfer.
Notre souhait de faire du bien et de les sauver va bien entendu à chacun d’entre eux.. mais hélas il nous est impossible de prendre sur nos épaules toutes les misères et injustices de la terre. C’est un tangible crève-coeur pour nous.
Notre amour pour les chevaux est fondé sur une véritable compassion envers tous les équidés sans exception.  Mais nous ne pouvons un million de fois hélas être les secouristes pour tous.
Ainsi c’était un mauvais moment pour Aicha, cette gentille jument frison déjà âgée. Tout lui mettait la tête à l’envers depuis quelques temps.
Depuis plusieurs jours, elle se retrouvait chez un marchand de chevaux qui n’a de goût que le profit et qui est bien connu par notre association pour ses affaires fort rémunératrices avec le monde de la boucherie chevaline. 
Au marché, Aïcha avait pris le rôle de viande sur pieds que les bouchers tâtaient pour évaluer les bénéfices.
Quelle autre issue pour ce gentil cheval que les tueries des abattoirs?   C’est en effet pour la tuer qu’on l’exhibe là...
Ici au marché, il n’y a pas de regard d’amour, pas ce regard d’or de celui qui donne mais bien de  celui qui prend.   Tout ce qui attire ici c’est l’éclat de l’argent, du profit.  Une vie est insignifiante face à l’avidité, à l’égoïsme qui font dégainer si facilement le couteau et  enterrent les consciences au niveau zéro.
Une chaleur douce et égale ainsi qu’une tendresse particulière se dégageaient de Aicha . Même si cette pauvre jument ne pouvait se faire mensonge à elle-même en cet endroit de négation de la vie, Aïcha n’avait aucun regard de haine et de mal.  Silencieuse, malgré sa banqueroute d’existence elle garda toujours en elle tout le meilleur : sa bonté et sa gentillesse.  Son drame n’avait pas entaché son caractère merveilleux.

C’était comme si la force de son esprit et de son coeur  lui faisait pardonner cette fatalité dévastatrice des hommes aveuglés par les gains.  Touchés par cette élégance d’humeur et cette grâce de bonté: nous ne pouvions pas laisser Aicha déverser son sang dans les  égouts des usines de la mort.
Nous l’avons rachetée et depuis lors nous l’avons entourée des soins les plus tendres et de tout notre amour.  Et puis en quelques heures par un triste  soir d’hiver, son état s’est dégradé à une allure folle et elle s’est éteinte.   
J’espère que nous avons réussi à  lui prouver que si certains hommes tiraillés par l’appétit de l’argent ont le coeur sec et dur, d’autres ont  heureusement de l’amour à profusion et ont comme seul bonheur de prendre soin des plus malheureux. J’espère du fond du coeur que Aïcha l’a compris.