DUDUCHE
Jument Trackener vendue pour la boucherie

ANNIVERSAIRE  :   22/08/1983
ARRIVEE AU REFUGE  LE : 16/07/2003
DECEDE(E) LE 18/05/2007​​​​​​​


Le coeur battant rudement  dans sa poitrine, la tête résignée vers le bas, une  grande jument maigre était attachée aux lourds barreaux des abattoirs d’Anderlecht au marché aux chevaux.
Silencieusement, elle se laissait envahir par les fantômes de son passé.  Tellement de noms, tellement de visages étaient dans sa mémoire et remontaient certainement  ce jour-là à la surface.
Pour elle , incontestablement  le présent mêlait des  ondes  sombres dans son esprit.
Le temps d’un battements d’yeux et elle comprit que ici bientôt tout serait  fini. Son corps excédé de fatigues ne réagissait plus aux triturages des marchands évaluant sa viande.

Heureusement, notre regard  a été happé par l’état frappant de maigreur  de ce pauvre cheval .
De plus, en caressant son encolure, on constata une pénible blessure suintante à l’épaule. 
Avec une expression découragée, la jument ne remua même pas à notre approche.
A part nous, les seuls regards qu’elle parvenait à encore décrocher étaient la pose glaciale et scrutatrice des yeux calculateurs des bouchers.  
A notre grand étonnement nous constations que cette jument était une véritable Trackhener (race d’origine allemande) : elle avait  la marque avec les 2 bois d’élan sur le côté gauche.. ce qui signifie qu’elle a été vendue très cher dans sa vie (+_  cinq mille euros)..
Ce qui prouve que même  des chevaux de valeur se retrouvent dans les couloirs des usines de la mort.  Bien entendu, pour nous qu’ils soient trackheners, frisons ou dadous «zinneke» c’est la même chose et très certainement et toujours avec une préférence pour les plus malheureux, les plus malchanceux.   
Devant l’état terrible de cette pauvre jument âgée d’une vingtaine d’année, nous ne pouvions moralement pas la laisser derrière-nous partir pour le dernier chemin...
Avec douceur, nous la prîmes pour lui donner un nouveau paradis. 
Notre vétérinaire nous déclara que les écoulements purulents à l’épaule de Duduche (nom que nous  lui avons donné) sont dus à une ostéomyélite (inflammation de l’os due fort probablement à un accident) nécessitant bien entendu de longs soins. Problème supplémentaire , Duduche a un accrochement sévère de la rotule postérieure gauche qui se coince et se décoince allégrement.
Heureusement, Duduche a rencontré chez nous une compassion réelle à ses malheurs,.   Nous avons tout fait pour lui redonner goût à la vie et lui révéler surtout  que dans le monde y a encore des humains qui ont du coeur pour les équidés.
Ainsi Duduche , sortie de son cauchemar, voit se succéder dans un décor autre que là où on l’exploitait : amour, bons soins , attention.
Mesurant sa chance, les yeux luisants de gratitude de Duduche a reflété  une forte reconnaissance pour cette évasion de la mort et cette nouvelle vie que seul 100 CHEVAUX SUR L’HERBE lui a donné...
Duduche a vécu presque 4 ans dans notre refuge....  Les deux dernières années son corps perclus d’arthrose avait du mal à se hisser du sol et pratiquement chaque semaine, nous devions l’aider à la  relever.  Opération fort difficile et même dangereuse car Duduche avait la particularité  dans ses moments de détresse de battre l’air avec ses pieds avec force et violence  pouvant en un coup sec vous briser un membre  ou vous tuer net. 
Et puis le 18 mai 2007 , son  grand corps ne se redressa plus...